Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :12 -Les poèmes de Fatima Maaouia:12 -3 : Aladin me hante 14 juin 2018 Fatima Maaouia Aladin n’a plus de lampe à la main Sûr et certain Qu’en prélevant sa rente, Du plafond aux plinthes La souillure Des hydrocarbures A fragmenté sous la soupente Sa nature Rigolote et conciliante Pauvre gamin… Aladin N’a plus de lampe à la main On lampe à deux mains Son matin Sûr et certain, Je vous dis ! Depuis qu’Aladin Pauvre petit Gît décoiffé sur la pente Ce n’est plus le même garçon gentil Car, en faction :”Assis!” A toujours demander pardon Pour ça, pour ci : Teint bizarre Accent de bazar Gestes et faits étouffés Cheveux ébouriffés… Par les méfaits De contes: faits: De mauvaises fées… Moins la parole … + Le pétrole Epris de son sol… Sans boussole…sous camisole Matin et lampe magique Troqués contre une lampe en plastique… Tout cela fait un peu trop Voyez-vous De Sahara et de Guantanamo au cou Désoriente beaucoup Et vous glisse l’être le plus doux hors de sa peau… Pour aller où?? – Du coup, Dans la tourmente De décembre Qui fractionne Et démembre En distinctes zones Violentes L’Etre et les membres Ses chaussures Liées aux pieds… eux mêmes… Pieds et poings liés Aux plaines Pillées… Ses chaussures Je vous dis Remplies De murmures Etuvés Ointes Des plaintes De ses pavés Jarrets renversés Ont jaillies fulgurantes À ses mains …disjointes Pour dire à la mauvaise fée Gouvernante du pénitencier Assez ! …………………………………………………………… Hedi Guella Cet Aladin qui déchante… Se relève et… chante ! Qui se frotte les yeux Et qui voit Sans sa petite flamme De rêve et enchanteresse Qui voit l’épine… au lieu des jardins La soif… au lieu des tankers… Les échines courbées Au lieu de la faconde du bon génie Cet Aladin-là Relevé par toi, Fatima Cet Aladin Est mon ami Mon double Et mon espoir… infini Il est oiseux de dire que la poésie militante a encore un grand rôle à jouer aujourd’hui, vu la période critique que traverse le monde et dont nous devons tous, en tant qu’intellectuels universalistes épris de paix et de justice, être pleinement conscients .Et rien de meilleur qu’un poème de la grande dame de la poésie engagée, l’algéro-tunisienne Fatima Maaouia, l’un des plus anciens membres de ma sélection poétique que j’ai créée en 2009, pour nous faire revenir à notre réalité amère, tout en profitant de ses prouesses techniques, ses trouvailles linguistiques et ses larges capacités de façonner l’expression poétique tel qu’il lui plaît, presque sans le moindre fléchissement du début du poème jusqu’à sa fin . L’idée maîtresse sur laquelle elle a construit ce nouveau texte se distingue par son originalité et sa subtilité .Est-il ,en effet, à la portée de n’importe qui d’imaginer une symbolisation en chaîne aussi subtile dont l’un des éléments renvoie à un autre ? Le premier, Aladin, pris comme signifiant, est puisé dans les mille et une nuits où il symbolise l’impossible qui devient possible ou le rêve qui se transforme instantanément en réalité. Quant au second, Hédi Guella ( 1951 – 2012 ), une figure emblématique de la chanson tunisienne engagée des années soixante-dix et quatre-vingt, bien qu’il soit utilisé ici comme signifié, il fonctionne aussi comme signifiant, du fait qu’il représente le rêve éveillé de près de trois générations acquises aux idées révolutionnaires et populistes, vouant une haine viscérale à l’impérialisme et à la bourgeoisie locale dite de comprador et un amour sans bornes pour les déshérités et les opprimés et croyant dur comme fer au changement radical de la société et à un lendemain reluisant pour l’humanité entière .L’image inoubliable de ce chanteur est demeurée vivante dans la mémoire collective surtout estudiantine, l’image d’un artiste populaire au sens vrai et noble du terme qui ne se produisait pas pour de l’argent mais uniquement pour servir les grandes causes et dont la seule présence sur scène, électrisait les foules de jeunes et soulevait leur enthousiasme délirant .Mais hélas ! …Le rêve n’a pas tardé à s’estomper et la lampe d’Aladin s’est peu à peu détraquée avec la montée inattendue d’un tsunami d’idées obscures qui ont fini par assombrir l’horizon. Un poème fortement nostalgique, empreint d’un ton douloureux et amer mais qui invite à une prise de conscience de l’ici-maintenant. 2018-06-14 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet