Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :12 – Les poèmes de Fatima Maaouia :12 -2 : Chevrotine 27 mai 2018 Fatima Maaouia La chevrotine, épicerie fine De Qatar a bouffé comme caviar ma rétine Les collines se ratatinent … Poison khôl qui pleut Et déchire le ciel de la prunelle de mes yeux Poison khôl qui pleut La couleur du ciel n’est plus bleue Ils ont pris mes biens les plus précieux: Mon âme et mes yeux Mais mon pays sous le feu Mon pays merveilleux De lieu en lieu En moi nid rêvé Par mille et un nœuds Rivets Accrocs, rires et bleus A moi… rivé Jamais ne sera eux Contrairement aux poèmes ultra-longs habituels de l’auteure qui exigent sans aucun doute de sa part un effort considérable, ce poème appartient à une nouvelle série qu’elle a commencé à publier dernièrement, qui se distingue par la brièveté et la spontanéité et dont la technique est tout-à-fait différente. Il ne s’agit probablement pas d’un changement radical dans l’orientation poétique de l’auteure mais tout simplement d’un besoin urgent d’un genre nouveau qui lui permettrait de se soulager des tracas du moment . En effet, militante progressiste de la génération des années soixante-dix et après avoir accueilli la révolution comme un grand événement salvateur, la poétesse n’a pu cacher sa déception immense et fort douloureuse devant la tournure qu’a eu cet événement. Ce qui a créé chez elle ce besoin vital de respirer par les mots et de réagir instantanément aux désagréments du moment. D’où la légèreté de ce poème, la simplicité de l’idée qu’il illustre par le biais de symboles facilement déchiffrables (chevrotine – poison khôl – rivet ) et l’attitude claire qu’il exprime à l’égard de la situation dégradée et dégradante qui prévaut dans le pays . Sur le plan esthétique, l’auteure est de ces poètes qui s’attachent vigoureusement aux nobles lois de l’art et ne basculent jamais dans la facilité, contrairement à certains versificateurs et ” écrivants ” de chez nous qui ont essayé d’enfourcher niaisement la révolution mais qui se sont heurtés au véto des connaisseurs. Et cette sensibilité artistique aiguisée de l’auteure se remarque ici dans la conception générale du poème qui a été construit selon l’effet de suspense engendré par la dualité : agresseur / agressé qui a couvert presque la totalité du texte avant qu’il ne se clôture à l’ultime vers par l’effet de surprise finale. 2018-05-27 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet