Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :4 -Les poèmes de Calli Mondésir :4-3 : Dialogue de l’âme et du coeur 16 mars 2018 Calli Mondésir I LE CRI D’UNE VOIX Maudit sois-tu poète sois maudit Ö ensorceleur de mots et de sens Tu t’es soustrait de la scène ambulante pour préserver ta vie Mais tu mourras car ton sort t’as suivi Comme un chien fidèle (Dans le pays où l’âge est à naître Et où l’horloge est à son aube) Afin d’étrangler ta flamme Tu mourras bientôt très tôt trempé de ta solitude Car tu ne m’as pas écouté Tu as fait plutôt de ta voix la voie à sillonner que la mienne Quand les regards de tes yeux Se sont fourvoyés dans le sourire leurrant du soleil Croyant dénicher l’amour Se nourrissant de chimères derrière ses feux aveugles Qu’as-tu eu que des yeux givrés de flammes foudroyantes ? Quand sur le ventre ton navire Crapahutait sur la vacant de la mer onduleuse Croyant dénicher l’amour Se rassasiant de tes félicités Dedans son ventre macabre Qu’as-tu eu qu’un navire cavalant So vague en sauts vagues et vacillants Sur les vagues du sauvage déchaîné ? Et quand l’envol de tes ailes a embrassé le vol du vent Croyant dénicher toujours l’amour ce foutu Soigner l’apparence de son visage horrible Qu’as-tu eu que des ailes morcelées Qui se brassent tant se brassent le vent et la poussière Mais qui ont à jamais perdu le lit du courant ? Je t’ai dit de ne pas te promener sur le rebord de la page Je t’ai dit de mettre la porte sous de verrous de fer et de rester à l’intérieur Je t’ai dit de ne pas t’errer au milieu de la nuit Car celui-là ce démon, ce diable, cet amour Guette comme un chasseur les cœurs-proies Pour les soumettre à des fantasmes de perdition Mais tu as enfreint mes réprimandes Tu as laissé la porte béante Et tu t’es flâné dans la nuit Comme si tu en étais le maître légitime J’ai entendu les autres t’appeler : Cœur-grand cœur-abri cœur-appui Cœur-sensible cœur aimant cœur fidèle Cœur chasseur des larmes sur les yeux Cœur poseur de doux sourires sur les visages Raseur de l’herbe sauvage dessus les cranes des jardins Cœur vigile contraignant les sorciers noirs d’envahir le soleil Qu’as-tu eu en retour toi? Tu es sans mémoire car tu t’es déguerpi (L’âme délavée et la mémoire engloutie Dans l’obsession de ton au-delà) Mais cette mémoire a survécu Et je vais te plaquer sur le visage ces souvenirs sordides de ton amour-folie Ils t’ont rompu les os comme le verre sur le sol Ils ont piaffé sur ton front comme les pas torturant les piétons Ils ont troué ta chair et tu as flotté Au milieu de l’emmêlement de ton sang et de tes larmes Ton amour et l’amour ont causé ma ruine Vas-tu enfin fermer la porte et t’abriter seul dans le feu de ta flamme ? L’amour de soi avant tout n’est pas parfait Mais pour survivre il le faut ô cœur têtu. II LE CRI D’UNE AUTRE VOIX Ö toi déflorant les mystères et qui vois au dessus du commun Toi abritant la pensée et qui la fertilises Je te salue et bénis ton nom car tu es mienne Et tu bats en moi comme bat la vie dans le cœur de chaque être vivant Pourquoi m’en vouloir autant parce que J’ai donné aux autres toutes mes richesses Tout même la paille qui allumait mon feu ? J’ai derrière moi jusqu’ici dans ma solitude Cette mémoire que j’ai hier tenté de délaver Encore je me rappelle des gifles sur mon visage Et des coups violents de poignards sur ma chair Ces cœurs à qui j’ai donné mes ailes pour voler dans le ciel Comme un essaim d’abeilles pourchassant les arômes Juste pour voir l’amour le toucher voire porter son manteau M’ont trahi et d’eux je n’ai reçu que du mépris et de l’abandon Mais ils vont bien eux et ils sont heureux Le froid congèle ma peau mais pas eux Et ce savoir me réjouit comme un fou En dépit des malheurs que cela me cause Que la mort m’emporte si c’est la pire des malédictions Qu’elle m’emporte car aimer est à moi un éternel envoûtement Je suis né rien que pour lui Ö Que je me moque de mes supplices Que l’on me leurre que que l’on me noie Que l’on me détruit que l’on m’éteint j’aimerai Et mon creux sera toujours un asile de survivants Je me donne moi et tout ce que j’ai Je me donne autant qu’est mon désir de n’attendre rien de vous Qu’un doux sourire Ö mon âme toi ma sœur aimée Ne me laisse pas si à autrui je suis tombé amoureux Comme ça comme un idiot Car aucun cœur ne mourra Aussi éteint qu’il soit dans sa cage Tant que perdure son souvenir. Le message transmis à travers ce poème est des plus simples et clairs : l’être humain vit , de par sa nature ,un conflit interne entre son cœur qui le pousse instinctivement dans la voie de l’amour et son âme qui lui impose des restrictions dans ce sens , de peur d’éventuels dérapages dus aux surexcitations incontrôlées .Néanmoins , cet amour est nécessaire pour faire jouir les cœurs d’autrui du bonheur tant recherché par les humains sur terre .Et les supplications que le cœur adresse à l’âme afin qu’elle soit compréhensive et tolérante à l’égard du rôle qu’il joue , montre que la solution idéale , pour l’auteur , est la conciliation entre ces deux forces internes de l’être l’humain . Cependant, ce problème paraît être plus complexe . En effet , les psychanalystes et les philosophes existentialistes ont démontré que l’amour, qui d’ailleurs est loin d’être une activité du cœur, n’est à l’origine qu’un désir libidinal pervers sur lequel le Sur-moi c.à.d. l’intériorisation inconsciente de l’image d’une personne représentant l’autorité exerce de fortes pressions afin de le refouler ou le transcender en le transformant en une forme d’amour sain . Ce que Sartre en réfute la possibilité pour la simple raison que l’Autre selon lui , est l’enfer et qu’on ne peut donc aimer .Malgré tout , que l’amour soit artificiel ou inexistant comme le soutiennent ceux-là ou inné parce que l’homme est bon de nature , comme le stipulent les optimistes dont Rousseau , nous ne pouvons , de nos jours , qu’adopter l’appel du poète parce que, d’une part, l’amour incontrôlé peut réellement évoluer en des formes morbides et néfastes et ,d’autre part, nous n’avons qu’une seule solution pour faire éviter au monde une catastrophe irrémédiable : l’amour d’autrui . qui reste l’unique remède contre le racisme , le fanatisme , l’intolérance , la mélomanie , l’ethnocentrisme … les vrais dangers qui menacent l’humanité .Enfin , sur le plan du style , la théâtralisation du poème en le construisant sous la forme d’un dialogue lui a conféré un attrait certain . 2018-03-16 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet