Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 2-Les poèmes d’Alain Minod : 2-4 :L’ennui et son fruit 15 février 2018 Alain Minod Forer l’ennui – le transpercer – Le tout en lançant Son cri Dans des langues épuisées Par leurs pays – En usant De modulations qui Telles une perceuse – Enfoncent des clous Dans la réalité Aux mornes Murs En comptant le silence Qui les habite – Enfourcher Le cheval de l’oubli Et balayer les mots-forces Qui créeraient des Dilemmes ou des Malentendus sur Le chemin des Respirations Puis … Casser les murs et Souffler au cœur de sa Demeure provisoire … Demeure du poème Sous l’auvent Pour que soit Ouverte Plein champ : La passerelle aux châteaux De la nouveauté … C’est la jeunesse qui s’y aventure En laissant patauger Les souvenirs de Ses vies Dans les douves C’est du poème que l’on rentre Dans ce focus du nouveau En se brûlant de Fantaisie Ainsi tiré – le macramé des passions – Vient habiller plein soir Jusqu’à la veille et … Ses nœuds s’animent – Réchauffant comme Braises la froide Distance On revient doucement aux laves Où vient rouler l’ennui Jusqu’à ce qu’il S’évanouisse Au creux Vidé de Son fruit On se souvient alors de son âge Et l’on mange doucement Ce fruit … Ce poème formellement hermétique pour le profane se lit, en réalité, facilement dès qu’on abandonne l’idée de la lecture syntagmatique ( mot après mot et phrase après phrase) pour dénicher les mots clés, s’y concentrer et les interroger, tout en les mettant en relation les uns avec les autres. En usant de cette méthode, nous découvrons le noyau sémantique de ce texte qui est composé ici d’une dualité saillante :l’ennui /la nouveauté , une dualité, à vrai dire, apparemment incomplète , étant donné que les deux mots qui la composent ne sont pas contraires. Et pour vous en assurer, il suffit de voir la liste des antonymes du mot « ennui » (activité – agrément – allégresse -amusement – bonheur – désennui – distraction – divertissement – enivrement – euphorie – facilité – gaieté joie – liesse- occupation- plaisir – récréation – satisfaction ) dont aucun n’est un vrai synonyme de « nouveauté », bien qu’ils puissent tous dénoter l’un de ses effets , vu que la nouveauté procure, généralement chez les épris du changement, le plaisir , l’allégresse , la joie et le bonheur. Dès lors, nous comprenons que ce poème est un texte à thèse et que cette thèse que son auteur soutient et à laquelle n’adhèrent pas, bien entendu, les classiques est que l’innovation est la seule source de plaisir en poésie, car la répétition des formes désuètes et figées finit toujours par faire tomber le discours dans la monotonie et la langueur .Ceci est grosso modo le message véhiculé à travers ce poème. Quant à son niveau stylistique, il se distingue, comme la plupart de tous ceux qui l’ont précédé de ce même auteur, par la richesse de ses trouvailles expressives et ses images inédites comme le montrent bien ces extraits : ( En usant de modulations qui telles une perceuse – Enfoncent des clous dans la réalité aux mornes murs – enfourcher le cheval de l’oubli et balayer les mots-forces qui créeraient des dilemmes ou des malentendus sur le chemin des respirations -ainsi tiré – le macramé des passions – vient habiller plein soir jusqu’à la veille et … ses nœuds s’animent – réchauffant comme braises la froide distance ).Une autre remarque non moins importante à noter ici est que l’innovation poétique, dont l’auteur se réclame , n’est pas un simple choix individuel mais une mission que doit se donner toute une génération , celle de la jeunesse poétique .Ce qui veut dire que la question de l’innovation est approchée ici dans le cadre du conflit des générations littéraires. 2018-02-15 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet