Épuisé, haletant, regard hagard et fiévreux
Un océan d’affreux et lancinants doutes
Sous soute
Car
Craignant le gouffre
Qui allait emporter à jamais son dernier souffle
Il jeta corps en nage et maigre bagage
Sur le vieux rivage,
Puis dans une ultime opération de sauvetage Lança au visage de la mer un flot
Tumultueux de questions dont elle ne retint que ces mots :
« O, mer, mon miroir
Raconte, raconte l’histoire
Raconte sans rien embellir »
Allez, dit !
Mer, personnage mythique
Matière sensible et authentique
Mer à la culture encyclopédique,
Ouverte sur toutes les civilisations
Répond à mes questions !
Et la mer au parcours exceptionnel
Qui en connait plutôt un sacré rayon
Sur l’élan et le bris d’ailes
La mer, matrice, pierre angulaire de l’univers
Qui soutient la terre par les aisselles
Pour l’empêcher de choir en statue de sel
Celle qui œuvre dans la continuité
Du fugace moment:
Ruptures, constructions, éboulements
Tant elle culmine et rumine de tourments
La mer, conductrice du meilleur et du pire
Bras envahissants et mystificateurs
La mer qui garde profond en mémoire
Conflits, migrants, traite, fleurs,
Passions histoires et tourments
La mer à l’humour si corrosif
Qui modèle quotidiennement monts et rifs
Et dont la vie a été, tout entière
Durant nos multiples vies
Tournée vers le partage et la liberté
Tournant le dos Aux ébats d’eau stériles et futilités,
Tressaillit et dans un sanglot :
« Tu veux savoir?
Alors, au risque d’anéantir tes derniers espoirs
Ton pays amer qui désespère et la terre et le ciel ?
C’est la mer à boire ! »
Et secouée de terribles convulsions
Qui noircirent sur le champ l’horizon
La mer, pourtant dont le jarret fougueux
Monte à l’assaut des volcans accrochés
Au firmament
Elle qui escalade cratères, falaises, brèches et rochers
La mer prenant jour et nuit sans broncher
Dans la cabine
En plein cœur, en pleine poitrine
Coups, tempêtes, vents mordants, ouragans
Accrochée aux poignets de la terre
Se roulant à terre,
La mer, sentinelle,
Déesse
Couronnée de sagesse
Et qui n’est pas sous écorce
Qu’écume, bavardage
Et étalage de force
S’est mise à pleurer dans les bras de la terre
Mais la terre qui depuis belle lurette
N’avait déjà plus de tête
N’avait plus de … bras !