D’un vague dégoût de la traitante humaine par : Patrick Berta Forgas – poète français 6 octobre 2016 Patrick Berta Forgas Il y a des corps qui meurent. Il y a des eaux jetées Des frontières du désert. Les continents confrontent leurs canaux. Comme les hommes S’imaginent les mers, Aux dimensions de leur taille. Petites plaies, Entailles qui s’infectent. La planète connait ses sangs. Nous ne marcherons plus longtemps. Le chemin a ses propres mots, De ceux qui se taisent Pour se perdre. Comment s’éteignent les siècles Et le silence des pouvoirs … Comment s’achèvent les nuits Quand s’embrume le cœur. Nous aurons tous le visage de la peur. Nous sommes les complices De ce que l’on nous allons devenir. Souvenir et soupçon Aux bancs des consciences. Folie des foules Dans l’égarement de la fuite. Frontières infertiles En faveur de la force. Ponts et rivières, Redestination La mer. Et la furie qui roule Aux sables des plages Ensanglantées. La fable pleure Les rêves Sur les pierres Bâties des rivages… Quand s’ennuient les guerres, L’avenir s’apprend à respirer De sombres jours. © Patrick Berta Forgas & N.A.D.A. octobre 2016 Crédit photo : Croix Rouge Italienne le 18 août 2016. Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor : Il y a toujours deux personnalités qui s’expriment dans la poésie de Patrick Berta Forgas :l’une est celle du penseur qui émet une vision constante ,inchangeable dans chaque poème et l’autre est celle du poète qui s’inspire du moment présent .Et le résultat de ces deux activités parallèles : intellectuelle et émotionnelle est la génération d’un arrière-fond de type philosophique personnel qui constitue le fonds de la pensée de l’auteur et en même temps l’expression d’une attitude à l’égard d’un sujet particulier. Dans ce nouveau poème, par exemple,l’auteur nous met dans la même ambiance tragique qu’il a l’habitude de créer dans la plupart de ses textes et qui englobe toute l’épopée humaine depuis ses débuts sur terre jusqu’à nos jours (Les continents – La planète- les hommes… ) .Et les composantes saillantes de cette tragédie sont ,en premier lieu, l’être humain lui-même qui a ici toutes les caractéristiques d’un personnage principal lunaire dont surtout l’absence totale de volonté ( Le chemin a ses propres mots,/ De ceux qui se taisent/Pour se perdre – Folie des foules/Dans l’égarement de la fuite ) et la soumission totale, d’un côté, au dictat de l’instinct animal et agressif qui l’habite (En faveur de la force – s’embrume le cœur) et de l’autre à un destin aveugle qui le guide vers sa perte (Nous ne marcherons plus longtemps ). Une autre composante de la tragédie est mise en évidence aussi dans ce poème, c’est l’autodestruction à laquelle l’Homme s’adonne, en menant ,depuis son apparition sur terre, une série interminable de guerres contre sa propre espèce (la furie qui roule/Aux sables des plages), ce qui a eu pour effet de placer le monde dans une situation de tension permanente (La planète connait ses sangs – Quand s’ennuient les guerres,/L’avenir s’apprend à respirer/ De sombres jours. ). Cette tragédie s’est traduite au niveau lexical par la distribution de la plupart des vocables utilisés sur deux isotopies : l’atmosphère catastrophique qui règne dans le monde et la faiblesse criarde de l’être humain qui est incapable de mettre fin à la tragédie qu’il vit . Mais dans ce tableau général terrifiant s’incruste le sujet particulier que le poète aborde à l’occasion de l’écriture de ce poème (D’un vague dégoût de la traitante humaine ) et auquel se rapportent une troisième isotopie composée de mots relatifs aux eaux ( mer-océan – vague- continent- rivière- ponts – plage-rivage ) .Et cet agrégat de mots laisse supposer que le noyau sémantique profond ici serait le problème actuel des passagers clandestins fuyant leur pays vers l’Europe à cause des guerres qui sévissent dans leur pays lequel fait l’objet de spéculations entre les grandes puissances pour marquer des buts politiques sous l’apparence de préoccupations d’ordre humanitaire. Stylistiquement, le point fort de ce poème et tous ceux du même auteur réside premièrement dans sa capacité de générer d’un même thème un nombre illimité d’images réellement nouvelles comme nous le voyons presque dans chaque vers, ensuite sa tendance constante à privilégier les connotations aux sens lexicaux dénotatifs . . 2016-10-06 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet