Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :10 -Les poèmes de Monika Del Rio :10 – 6 : Un cercle 15 février 2016 Monika Del Rio – poétesse polonaise – Toulouse – France Un cercle – Beau Rond Une figure Parfaite Comme un Plateau Dans des lèvres De Mursi, L’Univers Eclaté Qui court Vers le néant – J’ai peur… Une lettre « o » La voyelle, Telle la bouche D’un gosse Nu, appuyé Sur son bâton De berger Et qui regarde Etonné Des bolides Passer par Cette artère Coupant Sa terre en Deux. Un cercle – La figure De l’Univers, Un serpent Mangeant sa Queue, La naissance Et la mort, L’œil doré D’un léopard Couché. Ca y est ! Il s’est réveillé, Va chercher L’eau, Tout est rond Et beau Même Son sourire Meurtrière, La terre Continue A tourner Avec ou sans Nous, Un enfant Insouciant Avec son cerceau Joue… Ce poème a été construit sous la forme d’un rêve où les représentations se mêlent les unes aux autres et offrent apparemment l’image d’un paysage désordonné et incohérent. Cependant, un examen minutieux de ses structures profondes révélerait, par contre, une structure homogène et cohérente. En effet, trois axes sémantiques semblent se partager la totalité de ces représentations, à savoir : l’harmonie, l’angoisse et la fuite. Quant à l’harmonie, elle apparaît au niveau de la vision que porte la locutrice sur le monde et qui lui procure une claire sensation de bien-être (Un cercle/Beau/Rond/Une figure/Parfaite – Un cercle/La figure/De l’Univers – Et beau/ Même/Son sourire ), sachant que le cercle est, comme elle le dit,peut-être sans le savoir, l’un des symboles archétypaux de l’univers. Néanmoins, cette sensation d’accord avec le monde naturel se heurte à un conflit interne mettant aux prises deux forces contradictoires : d’une part une très forte énergie tendant à s’extérioriser et des obstacles qui lui barrent la route. Et si l’on regarde de près cette énergie, elle nous paraîtra vraisemblablement de nature sexuelle, car c’est ce que laisse penser l’image du serpent qui symbolise la cause du péché originel, étant donné que c’est lui qui a donné à Eve le fruit défendu. Et cette idée inconsciente de « péché » est apparemment ici la source d’un sentiment de culpabilité qui aurait occasionné à la locutrice une grande perturbation psychique. Il se peut aussi que cette énergie se fut extériorisée effectivement dans le réel mais avec la peur de la voir bloquée et étouffée dans un avenir proche. D’où une sensation vive d’angoisse qui a évolué en inquiétude existentielle (L’Univers Eclaté/Qui court/Vers le néant ) et que renforce ici la présence de l’image d’un fauve (L’œil doré/D’un léopard /Couché). Quant au troisième et dernier axe : la fuite, s’il est le résultat logique de cette crise psycho-mentale, il nous importe de connaître la nature de la fuite et la direction vers laquelle elle s’est produite : il s’agit ici d’une fuite vers le passé lointain : expressément vers l’enfance (Un enfant/Insouciant/Avec son cerceau/Joue…- un gosse/ Nu, appuyé/ Sur son bâton/De berger ) mais probablement vers la matrice de la mère que connote l’image de la Terre (Cette artère/Coupant/ Sa terre en/Deux.), le symbole par excellence de la mère originelle. Notre commentaire s’est allongé plus qu’il ne faut. Je dois donc m’arrêter, tout en insistant sur la richesse de ce poème et la diversité et la profondeur de ses dimensions psychiques et philosophiques 2016-02-15 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet