Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :41–Les poèmes de Dominique Montaulard Ziani :41-8: Pour toi, petit pigeon(Toi mon oiseau) :

Dominique Montaulard Ziani

 

Il a replié sa tête contre son cou

Dans un geste d’abandon poignant.

Il est là, sa délicatesse exposée,

Sa beauté fragile déjà souillée.

Il gît seul au bord de l’égout.

Hier encore Seigneur des airs,

Il volait tout en douceur;

Le voilà maintenant sur le sol…

Et le ciel prend un goût de cendre…

Un oiseau qui meurt,

C’est un peu de grâce qui se brise

Et un chant qui s’éteint

 

C’est l’une des rares fois où l’auteure quitte, ne serait-ce que momentanément, le temple  du dieu de l’amour  où elle vit ses états passionnels de tout son être, pour s’occuper de ce qui se passe  au dehors. Mais pour une âme sensible  comme celle d’une  poète, il n’y a rien d’étrange lorsqu’il s’agit d’un évènement aussi émouvant et extrêmement évocateur que la mort d’un oiseau, du fait que l’oiseau est un symbole céleste attaché à  l’esprit de la personne qui se le figure et aux métamorphoses de son âme et dont la signification première est le  détachement de la matière et l’envol très haut  dans les cieux. Ce qui l’associe dans l’imaginaire des artistes – et le poète en est un – à la liberté. D’où le caractère tragique que revêt la mort de cette fragile créature et le sentiment de peine que suscite la vue de son cadavre jeté  dans un coin sur le sol. Ce qui équivaut pour une âme frêle et douce comme celle des  poètes à l’effondrement de tout un  édifice spirituel  et  à l’affaissement d’un idéal sublime. Le thème est,  comme on le voit, très significatif et riche en  connotations et en nuances émotives. Et si nous regardons maintenant de près la relation qu’entretiennent les deux concepts d’amour et de liberté, nous remarquerons qu’ils sont  solidement liés. L’amour n’a pas-t-il toujours été, en effet, le haut-lieu  le plus sacré où les âmes se détachent complètement des valeurs matérielles ? Et c’est  pour cette raison  que notre poétesse n’a pas  quitté un seul instant  dans  ce  poème le temple du dieu de l’amour.

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