Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :39– Les poèmes d’Arezki Hatem:39 -3 : Vents du sud 27 juin 2019 Arezki Hatem Ö Vent du sud soufflant en tourbillons Mes mains nues n’ont de quoi s’en défendre Ton nom est Aarjei que les couteaux des touaregs Lardaient le cœur haineux Haineux et poussiéreux aveuglant les yeux de caravaniers Tu battais en retraite dans des canyons ténébreux, Pour mieux rebondir sur les traces de ton passé hargneux O vent Arifi Combien d’âmes tes langues ont-elles-brulé Combien d’oasis tes poussières ont-elles ensevelie Ta haine n’a d’égal que les géhennes écrites dans les livres sacrés O Samiel Vent et poison Ta trahison dans les champs de bataille, Ta versatilité devant de sobres guerriers Ont brisé le cœur d’hommes libres, Hommes libres espoir de nations enchainées O vent Ghibli Sécheresse est ton nom, fournaise ta moisson Roulant et grondant, Ton épouvante trouble le socle nerveux O vents du sud Je courbe l’échine quand vous soufflez De peur de mourir sans sépulture Le poème que nous allons lire ensemble aujourd’hui est d’un genre spécial, d’abord parce qu’il est conçu sous la forme d’un discours adressé directement à des destinataires inanimés ( quatre vents ), comme c’est le cas dans l’allégorie, mais à la différence que ce texte n’en est pas une, du fait que ces vents sont réels et non de simples signes représentant des idées abstraites .Ensuite, parce qu’il se situe entre la satire ( Haineux et poussiéreux – ton passé hargneux – ta haine n’a d’égal que les géhennes – vent et poison – ta trahison – sécheresse est ton nom – fournaise ta moisson …etc. ) et la plainte (mes mains nues n’ont de quoi s’en défendre – je courbe l’échine quand vous soufflez de peur de mourir sans sépulture ) . Quant à ces vents, ce sont des vents chauds bien connus qui soufflent fréquemment dans le sud du Sahara algérien et qui portent tous des noms locaux arabo-berbères (Aarjei – Arifi – Samiel- Ghibli ), d’où le caractère réaliste du thème abordé .D’autre part, par le biais de cette personnification doublée d’apostrophe ( c’est-à-dire la figure de rhétorique qui consiste à interpeller directement une personne ou une chose personnifiée) , le locuteur ( celui qui parle dans le texte ) place les destinataires dans une position d’agresseurs et en face d’eux soi-même ainsi que ses concitoyens sudistes dans une situation d’agressés , ce qui a donné une construction binaire du texte formée de deux isotopies distinctes ( vents attaquants / humains attaqués )sur lesquelles ont été distribués la plupart des vocables du poème .Ensuite, en plus de ce découpage vertical du niveau sémantique, le poète en a opéré un second sur le plan pragmatique, en adressant ses appels successivement aux quatre vents cités .Néanmoins , la valeur de ce poème ne se limite pas à cette finesse avec laquelle ont été confectionnées son ossature et sa texture .Elle s’étend aussi à son contenu qui laisse entrevoir, malgré son enracinement dans le local algérien, une dimension existentielle et humaine plus vaste , en mettant l’accent sur la lutte millénaire incessante de l’Homme, physiquement faible, contre les forces néfastes de la nature . Un poème subtilement conçu, empreint d’une grande sensibilité envers l’homme dans sa confrontation avec les conditions climatiques sévères . 2019-06-27 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet