Au bord de l’abîme
Planté d’épines
D’un trait de plume
L’ordre établi
Sur un champ d’orties
Biffe les acquis
Aveugle mes petits
Au bord de l’abîme
Nid trahi
T’as promis la lune
Planté l’infortune,
Au bord de l’abîme
Chevrotine à la Une
Le vent disperse mes rimes
Effrite ma farine
Violence et peste brune
Laminent à fond et minent
Les collines
Bouffées de famine
Rongées de vermine
Au bord de l’abîme
L’espérance inopportune
Langue de bois
Loups aux abois
Pharaon qui fait le paon
Incandescent
Omniprésent, sans transition
L’ESPOIR Chant profond
Lame de fond
Mue par son regard critique d’intellectuelle organique acquise aux hautes valeurs de liberté , d’égalité et de modernisme , la poétesse Fatima Maaouia réagit violemment à ce qu’elle perçoit comme un bafouement délibéré , intentionné et planifié de ces idéaux sublimes et à la détérioration qui s’en est suivie de la situation politique , économique et sociale dans le pays . Et pour illustrer cette dégradation rapide et inquiétante qui a touché aussi bien la condition matérielle des couches laborieuses que les acquis moraux et symboliques réalisés au bout d’une longue lutte à travers l’histoire , elle a usé massivement de deux procédés simultanés : l’hyperbole (au bord de l’abîme / planté d’épines / l’ordre établi sur un champ d’orties / planté l’infortune / violence et peste brune laminent à fond et minent les collines bouffées de famine rongées de vermine…etc. ) et le rythme accéléré basé sur l’asyndète c’est-à-dire l’ absence de conjonctions ( au bord de l’abîme planté d’épines d’un trait de plume l’ordre établi sur un champ d’orties biffe les acquis aveugle mes petits …etc. ) ainsi que sur l’accourcissement des vers et la constance les rimes tous les quatre ou cinq vers (établi – orties – acquis petits / minent – collines – famine – vermine / paon -Incandescent – omniprésent – sans transition – profond – fond ) ou leur résonance tout en étant éloignées (lune – infortune – Une – brune …) .
Un poème vivant inspiré directement du réel vécu et habilement ficelé .