Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi : 26 -27: Fini 3 avril 2019 Gaëtan Parisi Enfance Comment oublier l’errance Les coups de baguette Les folles cachettes Les boutons d’or Dans les près verts Les vers de Jacques Prévert Appris avec effort Enfance Comment prononcer ton nom Sans dénaturer la diversité La richesse de l’universalité Être Un Être A naître Sur le bout des lèvres Des lèvres muettes Des mères inquiètes Enfance Comment valoriser les jeux étranges Oublier les jambes en bâton des anges Les habiller de guenilles Leur donner des rêves de dentelle Accompagner les cocons de chenilles Pour devenir belles demoiselles Enfance Je dois m’en tenir à moi A l’image dans le miroir Mon mouroir Sans émoi Sans arrogance Sans réédition J’avance En perdition C’est mon seul pouvoir Me mouvoir Entre précipices Et hospices Entre mes cent ans Et le temps des genoux en sang En quête de paroles D’un regard Gaillard Un symbole Une reconnaissance L’amour sans absence Comment retrouver le trac Le moment du bac Des émotions en vrac Comme devant le tableau noir Immense tel le continent noir Tableau d’erreurs Tableau d’horreurs Frissons de mille couleurs Sur les peaux métissées du bonheur Je refuse de grandir Je refuse de m’anéantir Je refuse de partir J’entends l’accordéon Disperser ses flonflons Sur un rythme essoufflé Je perçois son silence Le vent de la nième danse Se noyer dans les voiles de satin De la robe de noce De l’ultime matin Et de la faucheuse précoce L’horloge s’est arrêtée à minuit J’entends le son assourdissant Agonisant Des battements lents De la nuit Tomber Retomber Goutte par goutte Dans le sablier L’ombre de mon âme Se fond dans un épithalame Elle est la voix de son oraison Toujours qualifiée de funèbre La chanson Des ténèbres J’ai accroché ma vieille peau au soleil Elle brûle sous ses rayons vermeils J’erre sans trajectoire Vers le purgatoire Le désert de mon histoire Le territoire de mes idées Blessées Pansées Un projet pour vieillard Voguer dans le brouillard Sous le faisceau d’un phare Enfance Elle prend des distances Je m’enfonce dans le crépuscule d’une étoile Une étoile qui s’éteint Elle expose sa vaste toile Sans teint La célèbre scène La plus obscène La décrépitude D’une âme sans aptitude “Mourir de se racrapoter” Comme le confesse Jacques Brel Dans ses murmures intemporels Je glisse sur des murs de glace Je perds ma place Je vis le vertige Du spasme qui afflige Loin de la désinvolture Je me réduis telle une abréviature Dans quel repli de lumière Trouverai-je la foi Pour faire face à cette loi Loi obscure Loi absurde de la nature Comment être un trait d’union Entre le ciel et l’eau Imiter les oiseaux Être en retrait Sur le silence de la terre Et l’histoire des convictions Être un pion Du souvenir éphémère Du récit épistolaire Enfin Résigné J’ai pleuré J’ai vidé l’encre de mes veines Sur le cahier de ma déveine J’ai écrit le mot Le mot de trop Trois lettres abjectes Infectes Puantes de vomissures Creusant les blessures De la vie et de la mort Fin Ce poème, bien différent des poèmes précédents du même auteur, des deux points de vue thématique et stylistique , laisse un peu à réfléchir, car si le retour à l’enfance, que ce soit en rêve nocturne ou en rêve éveillé , est une manière de retrouver l’être originel que l’on était et qui est , comme le dit Sigmund Freud (1856 -1939), « le père de l’adulte » et de s’y ressourcer et y puiser des énergies nouvelles , l’idée de la mort nous renvoie , au contraire, dans la direction opposée , vers un futur terrifiant où nous cesserons d’exister , donc nous sommes là devant deux tendances , somme toute, incompatibles .Et l’une des clés possibles, voire probables, de cette contradiction est que l’image de la fin dont le poète est hanté ne serait pas réelle mais abstraite et symbolique et touchant un attachement particulier. Et dans ce cas, cette sensation n’aurait rien de négatif .Bien au contraire, elle serait le début d’un nouveau départ qui sera renforcé par les ressources puisées dans le monde de l’enfance et notamment le rêve, le merveilleux, l’imagination et l’innocence .Cette interprétation trouverait sa justification dans l’état d’ébranlement affectif que lui a causé la rupture amoureuse unilatérale de la part de sa bien-aimée et à laquelle il a consacré la plupart de ses poèmes précédents. Pouvons-nous donc d’ores et déjà dire qu’il est sur le point de guérir de ce choc ? Seuls ses prochains poèmes nous le diront. Stylistiquement, ce poème est le premier de cet auteur à être aussi long. Est-ce aussi le début d’un autre style d’écriture ? Signalons au passage que la taille du poème dépend exclusivement de l’humeur du poète qui tend soit vers l’expansion , soit vers la condensation sinon vers une taille moyenne .Mais étant donné que c’est, apparemment, la première expérience avec ce genre de forme poétique, l’auteur a , visiblement, bien pris son temps, car le niveau de poétisation du texte n’a pas baissé du début jusqu’à sa fin .Bien plus, le poète nous a gratifiés de plusieurs images surprenantes telles que (Tableau d’erreurs/ Tableau d’horreurs/ Frissons de mille couleurs/ Sur les peaux métissées du bonheur- J’entends le son assourdissant/ Agonisant/ Des battements/ Lents/De la nuit/ Tomber/Retomber/Goutte par goutte/Dans le sablier – Enfance/Elle prend des distances/ Je m’enfonce dans le crépuscule d’une étoile/Une étoile qui s’éteint/Elle expose sa vaste toile/Sans teint ).Le rythme , de son côté, n’a pas perdu, malgré la longueur, de son intensité grâce à l’accourcissement des vers et à la régularité des rimes et des sonorités . 2019-04-03 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet