Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi : 26 -16 : Femme 5 mars 2019 Gaëtan Parisi C’est la matière qui façonne le corps Une glaise aux filaments de fer multicolores Terre de pierre Sous les flammes de l’enfer Masse de carbone étiré en long Qui se tisse comme un sarong Ton corps est le costume de ma vie C’est la matière qui façonne l’esprit Aussi, mais oui Une terre légère et mobile Volubile Qui s’enroule comme un souffle à l’existence Elle forme des nuages de rêves Façonne les sentiments aux mille nuances Elle a la couleur des paroles brèves Ton esprit est le chapeau de ma vie Ton être est la révélation De la matière La confirmation De l’eau et de la poussière Ton corps et ton esprit habillent ma vie Je suis l’antimatière Je me fonds en masse et lumière Pour rejoindre ton énergie Etre avec toi en synergie Et annuler toutes les distances Tu es le noyau de mon existence Ton souffle est mon vent amniotique Ton cœur mon centre atomique Ton amour est la matière de ma vie Dans ce poème , nous sommes saisis, du début jusqu’à la fin, par une tentative poussée à l’extrême d’appréhender l’essence de cet être aussi sublime qu’énigmatique qu’est la femme dont l’homme reste dépendant pendant toute son existence, du fait qu’elle lui a donné la vie et grâce à elle, il contribue à perpétuer la vie et étant donné que c’est sous l’effet magique de son amour que se forge sa personnalité et son entité psycho-spirituelle . Freud et consorts n’ont-ils pas si brillamment démontré que la femme dont l’homme tombe amoureux incarne, tant soit peu, une image déguisée de la mère ? Bien entendu et comme nous le voyons dans ce poème, c’est toujours l’image de la bien-aimée qui occupe la zone conscience du locuteur. Mais si celle de la mère reste implicite, il n’en demeure pas moins que c’est elle qui modèle et dirige, au niveau de l’inconscient, l’activité sentimentale de l’homme. Et la preuve en est que de l’image de celle qu’il aime à l’instant présent, il se trouve entraîné dans une plongée rétrospective qui l’a mené jusqu’au temps de la création originelle où ont été façonnés le corps et l’esprit de la première femme , la mère de tous les hommes . D’où la substitution possible et très aisée , l’une à l’autre , des deux allocutaires :bien-aimée / mère dans la dernière strophe (tu es le noyau de mon existence/ ton souffle est mon vent amniotique/ ton cœur mon centre atomique/ ton amour est la matière de ma vie ). Sur le plan du style ,verticalement ou paradigmatiquement d’abord , le poème a été construit sous la forme d’une équation (ton corps est le costume de ma vie + ton esprit est le chapeau de ma vie = ton corps et ton esprit habillent ma vie + un développement de ce résultat final ) tandis qu’au niveau horizontal ou syntagmatique , la langue a été fortement poétisée par l’accumulation d’écarts et de sonorités dont n’est exclu, à peu près, aucun vers ( C’est la matière qui façonne le corps/ Une glaise aux filaments de fer multicolores / Terre de pierre/ Sous les flammes de l’enfer /Masse de carbone étiré en long/ Qui se tisse comme un sarong/ Ton corps est le costume de ma vie ). Encore une belle réussite de la part d’un poète qui allie admirablement la rigueur de la technicité au plaisir de l’écriture. 2019-03-05 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet