Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor : 26–Les poèmes de Gaëtan Parisi : 26 -12 : Soudés comme le fer

Gaëtan Parisi

 

J’ai dans le cœur

La trace d’heures exquises

Quand près de moi avec ardeur

Tu viens de ta banquise

Te blottir dans ma chaleur

Pour peindre le noir en or

Des nuits du grand nord

Sur mon corps, tes caresses

Posent un manteau de velours

Sur mon cœur, un souffle d’ivresse

Brûle les premières lueurs du jour

Enfin se dessine la forme mûre de notre amour

Les mouettes sur la mer

Récitent du Prévert

J’entends leurs cris faire écho

Comme un espoir à ces mots

Je ne sais pas pourquoi

Un vent nouveau souffle sur moi

Comme les rythmes de chansons tendres

Aux refrains magiques sans méandres

Tu es la chaîne verrouillée de ma chair

Personne ne viendra me délivrer

Même le plus fort de l’univers

Sous les flammes de l’enfer

Ne pourra nous défaire

A jamais soudés

Comme le fer

 

L’amour que célèbre  le locuteur  dans ce poème a expressément la plupart des caractéristiques de l’amour  fusionnel  dont surtout l’impossibilité pour les deux amoureux de  vivre l’un sans l’autre (tu  es la chaîne verrouillée de ma chair/ personne ne viendra me délivrer/ même le plus fort de l’univers/ sous les flammes de l’enfer/ ne pourra nous défaire/ à jamais soudés comme le fer)  . Et malgré l’absence  d’indices sur  son éventuelle nature platonique , étant donné qu’il n’y a mention  qu’à un léger  contact corporel externe (tu viens de ta banquise te blottir dans ma chaleur  ) , elle n’est  nullement à exclure , vu que les   émotions  exaltées  et dénuées de toute coloration sexuelle que cet amour fait éprouver  au locuteur   pourraient  bien dissimuler un fort attachement spirituel (tes caresses posent un manteau de velours sur mon cœur – Les mouettes sur la mer récitent du Prévert j’entends leurs cris faire écho comme un espoir à ces mots – un vent nouveau souffle sur moi comme les rythmes de chansons tendres aux refrains magiques sans méandres ) . Néanmoins,  les sensations enflammées qu’il dépeint  ne cachent pas le caractère nostalgique de cet amour annoncé furtivement au deuxième vers (J’ai dans le cœur la trace d’heures exquises) et que le lecteur non attentif pourrait   vite oublier ou n’y pas faire attention du tout. Ce qui dote, donc, le poème de deux niveaux distincts : l’un est apparent  faisant étaler un bonheur éclatant et l’autre est profond renfermant une douleur sentimentale extrêmement  vive. A cette construction en double étage, s’ajoute  sur le plan  du style l’effort très évocateur déployé par l’auteur  tout le long du texte dans  la figuration rhétorique  aux deux niveaux des images et du rythme. En un mot : un poème bien réussi comme la plupart de ceux qui l’ont précédés !

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