Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :12 -Les poèmes de Fatima Maaouia:12 –6:Les poètes

Fatima Maaouia

 

Les poètes 

Sont prophète

Leurs pensées libres

Sont liées à ce qui vibre 

Et le défunt vain,

Qui plie en deux 

En vain sur eux déteint

En vain…

Car le feu en eux 

L’a déjà atteint et éteint »

 

Ce mini-poème  qui attire d’emblée l’attention par cet écart orthographique saillant lancé comme un défi aux académiciens (Les poètes  sont prophète  ) est, comme je l’ai su de l’auteure elle-même, relativement ancien. Il daterait de la période où elle faisait ses premiers pas et avait les traits que nous voyons dans cette photo. De ce fait, il revêt pour l’historien de la littérature une importance historique. Et puisqu’il a, à peu près, la forme d’un manifeste, il peut nous éclairer sur les choix poétiques et intellectuels qui l’animaient à ses débuts, surtout que nous avons une idée claire sur son expérience actuelle qui s’inscrit sans nul doute dans le courant militant et engagé. La principale information que nous fournit ce texte est l’attachement de  son auteure à la valeur intrinsèque de la poésie qui est, avant tout, comme l’a dit Paul Valéry, une «  expression artistique d’une expérience vécue ».Et ce, contrairement à ce que prône le jdanovisme pour qui  le texte littéraire tire sa valeur uniquement de son contenu révolutionnaire. En effet,  Fatima Maaouia ici  élève le poète au rang des prophètes (les poètes  sont prophète(e)) certainement  grâce au don de visionnaire   dont il jouit et qui lui permet de voir l’avenir. Ce que nous traduisons par le terme cognitif de capacités intuitionnelles  qui n’ont rien de surnaturel .Un deuxième don est mentionné explicitement aussi dans ce texte : c’est l’hypersensibilité mais dans un cadre bien déterminé : la liberté de pensée et la vie (leurs pensées libres sont liées à ce qui vibre ),  en insistant tout particulièrement sur la vie et en excluant fermement tout ce qui est lié à la mort (le défunt vain, qui plie en deux  en vain sur eux déteint en vain…) qui n’a aucun droit à l’existence, pour la simple raison qu’elle est la négation de la vie. Un troisième don dont le poète est détenteur, c’est l’énergie puissante et purificatrice qui l’anime et que la poétesse symbolise par le feu , un feu qui brûle le vain et fait pousser de ses cendres l’utile et l’efficace. Et voila que nous retrouvons la Fatima militante et engagée que nous connaissons et qui ne s’est  donc jamais  départie de ses convictions artistiques et intellectuelles depuis ses premiers pas  jusqu’à ce jour,  demeurant toujours  jeune avec ses idées progressistes et son art constamment  renouvelé.

 

 

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