Les archives des commentaires poétiques de Mohamed Salah Ben Amor :8 – Les poèmes de José Le Moigne :8-3 : Nous vieillirons

José Le Moigne

Nous vieillirons
sanglés dans nos sanglots
et dans nos certitudes

Nous aurons dans les mains
des proses suicidaires
et des printemps inexploités

Nous serons tout
nous serons rien

Quand nous mettrons nos pas
dans les pas de la mort
Dans ce nouveau mini-poème, un genre médian entre le poème ordinaire et le haïku que l’auteur affectionne tout particulièrement et dans lequel il conçoit la plupart de ses poèmes, il se penche expressément, dès le titre, sur une question redoutée et même parfois niée par les artistes en général dont les poètes, pour la simple raison que cette catégorie de personnes se distingue, comme il a été prouvé scientifiquement, par la pérennité de leur âme d’enfant. Ici , c’est de l’appréhension de cette étape de la vie qu’il s’agit (vieillirons sanglés dans nos sanglots – proses suicidaires – nous mettrons nos pas dans les pas de la mort) et qui constitue donc l’idée charnière du texte. Et en examinant de près les contextes dans lesquels l’idée de la vieillesse a été évoquée, deux remarques attirent notre attention : la première est que c’est de la vieillesse affective (nos sanglots ) et mentale (nos certitudes – proses suicidaires – printemps inexploités) et non physique qu’il est plutôt question et la seconde est que le locuteur ne décrit pas un fait accompli mais il procède à une projection de cet état tant craint dans le futur ( vieillirons – aurons – serons ). Ce qui fait qu’elle a tout d’une idée délirante surtout qu’ele est associée à la mort .Néanmoins, un indice quoique très minime embrouille l’intention de ce locuteur (nous serons tout) qui, bien qu’il ait été émis concomitamment avec son contraire ( nous serons rien ) lequel va de pair avec l’idée maîtresse du texte, ferait penser que la vieillesse n’est pas l’enfer .Au niveau du style, le poème a été, concision aidant, tissé intégralement de connotations et de sens seconds .