Je suis au ciel par : Gaëtan Parisi – poète italien – Belgique 8 février 2016 Le poète Gaëtan Parisi Choisis ta mort Choisis ton camp Aborde le regard des passants Efface de ta bouche Mets en touche Le remord L’amour n’est jamais offert A force de le taire Il se perd Perds ta main de fer Passe la porte de l’enfer Sur l’écorce douce des bouleaux Laisse ta peau en lambeau Choisis ta mort Choisis ton sort Ton sort est dans un nœud Aimer Aimer est un vœu Défiguré Torturé Fissuré Son silence inflige Des blessures Des fêlures Le mal se fige Quand tout se bouscule Quand tout bascule Quand le froid Des nuits sans draps Nous fait perdre la foi Quand l’arme de ses bras L’absence Lancinante Sans combat Trucide nos sens Choisis ta mort La mort rassure Comme le blanc azur L’azur d’une promesse Déesse Abuse de mon corps Use de ton cœur Renonce au futur Obscur Accepte le jour Jour après jour Chaque jour Creuse un thème Ce n’est pas un blasphème Dis je t’aime Je t’aime Je t’aime Encore je t’aime Choisis ta mort Étale ton sang sur un parchemin Assume ce destin Assure un chemin Avec une autre calligraphie Ecris Un lendemain Un lien Qui unit Tu es pour mes nuits Un astre qui brille L’incandescence d’un rêve infini La vie Au delà de l’oubli Tes yeux sont la panoplie Des couleurs De l’arc-en-ciel Je suis au ciel. Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor : Ce poème est conçu sous la forme d’un discours injonctif dont la plupart des actes de langage qu’il comporte appartiennent à ce que John Searle (né en 1932) a appelé la catégorie des « directifs » c.à.d. les demandes adressées par un locuteur à un destinataire donné pour obtenir de lui des choses bien déterminées .Dans le contexte ci-présent, le locuteur a joué, du début jusqu’à la fin , sur le sens du pronom personnel « tu », en laissant dans l’ambigüité ou , si l’on veut , dans la pénombre l’identité réelle de celui ou de celle à qui il parle .S’adresse-t-il à celle qu’il appelle « déesse » citée dans le vers 39 ? Et dans ce cas qui pourrait-elle bien être ? Une bien-aimée ou la mort ? En plus, dans les 38 premiers vers, on a une forte sensation qu’il parle à soi-même et non à une autre personne. En réalité, les deux notions essentielles autour desquelles s’articule le texte, celles de l’Amour et la Mort, sont, contrairement aux apparences, fortement liées. En effet, Sigmund Freud(1856 – 1939) n’a-t-il pas attribué le vrai amour , l’amour profond et intense à l’instinct de mort qui , avec l’attraction vers le bas qu’il exerce sur l’être humain pour le faire revenir à l’état inanimé dont il est issu , lui fait sentir un mélange de volupté et de douleur insupportable ? (Déesse / abuse de mon corps/ use de ton cœur – dis je t’aime/ Je t’aime/ Je t’aime/Encore je t’aime/Choisis ta mort/ étale ton sang sur un parchemin ).Et cette dualité : Amour /Mort appartient vraisemblablement à la zone irréelle de l’amoureux, voire de l’être humain en général. Ce qui en fait pratiquement une forme atténuée de folie. Enfin , armés de ces interprétations , le fond du texte pourrait s’éclaircir à nos esprits et avoir le sens suivant :un amour fou serait emparé du locuteur et lui aurait occasionné une sorte d’extase douloureuse qui lui aurait fait subir une mort psychologique symbolisée dans le litre ainsi que dans l’ultime vers par ce passage au royaume des âmes ci-haut dans le ciel . Sur le plan stylistique, notons le rythme frénétique engendré par l’accourcissement des vers et l’usage massif de l’anaphore .D’autre part, le fait de placer le locuteur tout au long du texte au ciel en tant que mort et la bien-aimée sur terre en vie a conféré au poème un charme particulier matérialisé par ce dialogue épatant entre l’ici et l’au-delà. 2016-02-08 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet