Il y a dans certains pas
Des voracités d’écho
Le temps, vaincu, s’y distend
Volutes de nuit durcies
Fumée des rires d’angoisse
Des enfances abolies
Pas comme une main dans l’ombre
Dont les doigts empaument un cœur ;
Lorsque ces pas font silence
Tout soudain en nous respire
Comme une première fois.
Pourtant, les pas reviendront
Tout chemin qu’ils ont marché
Est bon à être arpenté
De nouveau. Le souffle court
Je guette les distorsions
Du silence, infimes failles
Où ils sinueront bientôt
Mais rien, le pandemonium
Ordinaire de la vie
Jusqu’à quand ? Nul ne le sait
Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor :
L’auteur de ce poème nous livre un ensemble d’impressions sur un acte de locomotion ordinaire : le pas qui, s’il n’attire normalement pas l’homme commun sauf lorsqu’il ne s’accomplit pas selon la norme pour une cause pathologique ou fantaisiste, l’artiste ou le philosophe peut y déceler des significations symboliques comme tous les actes, les événements, les êtres et les choses dans ce monde.
A première vue, cet acte est présenté ici comme une source d’angoisse et sa description que l’on voit élective, du fait que le poète n’y relève que les éléments qui lui semblent pertinents et suggestifs, s’est focalisée, tout au long du texte, sur deux de ses aspects : l’auditif et le visuel, lesquels s’égalent de part leur effet affreux et nuisible sur l’être humain sensible , ce qui a donné, dès le titre, un tableau des plus désolants et des plus effroyables (voracités d’écho – Volutes nuit durcies – rires d’angoisse – enfances abolies…etc….) et que l’auteur a résumé dans la dernière strophe par le mot « pandemonium »( Lieu où règne une agitation infernale).
Cette description se place, en réalité, dans une perspective phénoménologique et existentielle, du fait que l’action de marcher donne à l’individu qui l’accomplit l’illusion qu’il avance de sa propre volonté, tandis que, d’un côté, il ne fait que suivre le traçage du chemin qu’il emprunte et, de l’autre, ses pas s’effectuent nécessairement dans un intervalle de temps bien déterminé. Et ce lien temporel est plus angoissant parce que quels que soient les buts heureux que l’homme peut atteindre le but final sera inéluctablement la mort.
Un poème philosophique sur un thème inédit et dont le style s’est fondé sur l’accumulation des écarts et des sens seconds .
Rolande Bergeron On y sent les pas d’une armée marchant au pas de l’oie et le pas inquiet du marcheur isolé quand ces pas se taisent car il sait qu’ils reviendront… Les 20e et 21e siècle débutants ont imprégné les cœurs de cette peur… Merci à Pascal Perrot et à vous, Mohamed Salah Ben Amor. Et bonne année 2016 à vous deux !
Safia Kahina merci pour ce plus , je ne connaissais pas le mot pandémonium, oila que c est la capitale de l enfer !