LA PART DU PÈRE par : Patrick Berta Forgas – poète français – Paris 8 décembre 2015 Patrick Berta Forgas – poète français – Paris An old house in herault, France, in a stormy weather Nous habitions tous une maison Immense avant, oubliée depuis. Soldats de plomb et faïences D’anges aux étagères… Souvenirs aux combles du souvenir ! Il y aura toutes les pluies utiles À noyer les toitures fragiles Où se blottissait un clown … La grimace au grenier, Sous la fuite des tuiles Et des tempêtes de vies. Nous habitions une maison Aux sombres escaliers De secrets … Là reposent les lettres D’un alphabet muet. D’autres mots, Un seul cri. L’effort des pères. La fatigue et la sueur À se tromper toujours ! Parce que le manque Et l’idée de misère Assurent si souvent, l’erreur. Des pas ont taché le marbre… Des traces et des poussières Traquées jusqu’au jour. Il fallait que la neige sèche Le territoire du cœur … Il s’espace des raisons Que le mensonge appuie. Quelques marques Au passage d’un ange, Là, sur les terres De vérité. © Patrick Berta Forgas & N.A.D.A. novembre 2015. Crédit photo : Laurent Bourdaire. Commentaire de Mohamed Salah Ben Amor : La clé de ce poème hautement symbolique et dont le champ sémantique tourne autour d’un lieu énigmatique (une maison) pourrait se trouver dans les deux expressions suivantes : « le territoire du cœur » et « les terres de vérité » lesquelles dénotent deux lieux secondaires abstraits qui relèveraient d’un tout de la même nature et ce tout pourrait bien être la maison dont parle le poète. Quelle est donc cette maison immatérielle ? Et qui sont ses caractéristiques? D’après les données descriptives que le poète nous a fournies, cette maison était dans le passé notre lieu d’installation (nous c.à.d. les humains) mais elle ne l’est plus aujourd’hui, soit parce qu’on nous y délogés, soit suite à un abandon délibéré de notre part. Et étant donné qu’elle est collective et abstraite, elle a tout l’air de la philosophie ou la vision du monde qu’avaient conçue nos ancêtres (la part du père – l’effort des pères) et elle se caractérise, selon les dires de l’auteur, d’abord par une mise en relation étroite entre ciel (anges – passage d’un ange) et terre, entre l’au-delà et la vie d’ici-bas, ensuite par le culte de la guerre (Soldats de plomb) qui leur servait à satisfaire leurs besoins agressifs aux dépens de l’Autre et qui était à l’origine d’innombrables massacres (Sous la fuite des tuiles/ Et des tempêtes de vies), enfin par l’incapacité d’accéder à la vérité (La fatigue et la sueur/À se tromper toujours – Parce que le manque/Et l’idée de misère/Assurent si souvent, l’erreur). Mais l’abandon par l’homme d’aujourd’hui de cette philosophie croulante édifiée sur une vision erronée du monde peut-elle être considéré comme une libération et une évolution positive ? Pas du tout ! En effet, si nous plaçons ce poème dans l’ensemble de l’œuvre de son auteur où il ne cesse de brosser un tableau cauchemardesque de l’épopée humaine sur Terre et nous établissons une liaison entre cette vision et le titre qu’il a choisi ici « La part du père »,nous déduirons, au contraire, qu’il tente cette fois d’expliquer le présent par le passé, en montrant la contribution désastreuse de l’homme d’hier au façonnement de la mentalité et du comportement de l’homme d’aujourd’hui. Du point de vue stylistique, le poète a réussi, comme d’habitude, à nous gratifier d’un texte pluriel bourré de symboles, de connotations et de sens seconds, de nature à offrir à chaque lecteur avisé l’occasion de l’interpréter selon sa propre compréhension. 2015-12-08 Mohamed Salah Ben Amor Partager ! tweet